Édifiant, le film d’investigation Océans, la voix des invisibles, de Mathilde Jounot, montre les motivations troubles des ONG environnementalistes se positionnant pour la sauvegarde des océans et des poissons. Diffusé en avant-première le mercredi 16 mars lors du festival de films Pêcheurs du monde, il passera le jeudi 24 mars sur les chaînes bretonnes Tébéo, TébéSud et TVR.
Point de départ, la disparition des espèces marines et la situation dramatique des mers largement dénoncées par ces ONG. « Si c’est pour dire ces conneries », s’emporte Robert Bouguéon, l’ancien pêcheur, tournant court à son interview sur les quais de Saint-Guénolé. Les messages alarmistes sont balayés par d’autres pointant la drastique diminution de la pression de pêche en tout cas en Atlantique nord-est, en effet surexploité jusqu’au début des années 2000, et la reconstitution en cours des stocks de poissons.
Ce documentaire montre que derrière des positions environnementalistes se cachent de grands enjeux financiers. En quelques clics sur internet et extraits de leurs discours, il ne faut pas chercher bien loin pour voir les liens directs entre les entreprises transnationales privées, les banques et les ONG. Ni leurs mécanismes d’influence ni leur mode opératoire en investissant dans la conservation des océans pour en retirer un bénéfice maximal, grâce à la compensation et à l’extraction d’autres ressources qu’halieutiques. Via, par exemple, le rachat de dettes de pays en voie de développement contre la mainmise sur de grandes aires marines protégées.
Déficit de démocratie
Mais surtout, la réalisatrice met le doigt sur un gros déficit de démocratie. Des sociétés, des organisations internationales et des ONG sont désormais les acteurs de la gouvernance mondiale, au détriment des États. Ce n’est pas tant leur business qui choque, que l’absence de contrôle politique envers ces acteurs disant représenter la société civile. Au détriment des travailleurs de la mer, dénoncent des spécialistes de ces questions, qui ont trouvé leur porte-voix.
Comment les citoyens peuvent-ils réinvestir les océans, les pêcheurs continuer à pêcher ? En les associant à la gestion de la ressource, partout. Des Seychelles, d’Indonésie, du Kenya, du Sri Lanka, d’Ouganda des communautés de pêcheurs brandissent les mêmes exigences : ne pas les exclure des décisions sur leurs zones de pêche. « Ils sont des milliers à se battre. » Réconfortant après le coup de massue. Pour qu’ils soient entendus, suivis, Mathilde Jounot s’emploie à sensibiliser le grand public, préparant une version anglaise pour une diffusion internationale.