PIERRE BRUNET, marin -pêcheur aux Sables d’Olonne.
« Fils et petit-fils de marin-pêcheur, je suis né à la Chaume, le 12 septembre 1943 et je suis entré dans le métier à 14 ans pour 37 ans de navigation active. Enfants, nous habitions derrière la tour d’Arundel, une maison construite avec des pierres de côte, et de ce fait imprégnée de sel marin. L’humidité ressortait et produisait du salpêtre.
Mon père était propriétaire de deux pinasses. Le Cicit & Jojo était un bateau de 12 mètres, ponté, construit en 1941. Le Petit Pierrot, plus petit, ponté également, mais à baignoire (avec un creux à l’arrière du bateau), avait été construit à la fin de la guerre de 39-45. Les deux bateaux étaient conçus pour faire le « chalut-côtier.» En hiver, la crevette grise. En été, la sardine au filet droit.
Ma mère était une femme active, petite. Elle faisait face à énormément de travail : l’entretien de la maison, les enfants, gérer les comptes des bateaux. En été, l’entretien et la réparation des filets pour la pêche à la sardine. Les femmes qui s’occupaient des filets, on les appelait les « garçonnières » un terme chaumois. Ce travail demandait beaucoup de main d’oeuvre, car ces filets étaient en coton. En général un filet de 25 mètres, avec différents maillages, selon la taille de la sardine. Il fallait avoir séché et réparé les filets très tôt le matin, car la sardine était pêchée à la pointe du jour, On appâtait avec des oeufs de morue en barriques de « rogue » et de la farine d’arachides, achetée à la Coopérative par sac de 80 kgs. Et pour toute rémunération, ma mère recevait une caisse de sardines par jour.
Vers les 8 ou 9 ans, pendant les vacances d’été, l’occupation principale consistait à attendre les bateaux qui rentraient aux différentes heures de la journée, afin de prévenir ma mère. Alors elle arrivait avec une charrette à bras. A partir de la barque annexe du bateau de pêche, un matelot déposait dans la charrette les filets encore humides, à réparer et faire sécher. Cela se faisait à la cale directement, ou sur les marches en fonction de la marée et de la hauteur d’eau. Le marin qui apportait les filets faisait savoir quelle taille de filet, Il lui faudrait pour le lendemain, selon la taille de la sardine. Le bateau partait plus ou moins tôt, selon que la pêche devait se faire à un quart d’heure du port ou à deux ou trois heures de route. C’était chaque jour, sauf samedi et dimanche. Chez les « garçonnes » pas de chômage au week-end, car c’était le moment de réparer et d’entretenir les filets. Souvent les méduses qui avaient laissé une trace en glissant le long des filets irritaient les yeux et le nez. Il fallait étendre ces filets, les passer au bleu de méthylène en de grands bacs, les étendre pour les faire sécher et, en finale, les mettre en des grands sacs numérotés. La taille du filet était reconnaissable à un morceau de bois qui l’indiquait.
https://rcf.fr/vie-quotidienne/solidarite/pierre-brunet-1
La dureté et la passion de ce travail…
oui, effectivement c’est un métier dur mais avec un sentiment, quand nous sommes en mer, de liberté. Nous sommes vraiment dans un autre monde que les terriens peuvent sentir de part les retours des marins, mais pour bien comprendre ce milieu, il faut le vivre. Merci aux gens de mer pour votre courage, pour les captures que vous nous ramenez et que la mer veut bien vous laisser. Resté au contact de ce bel élément si formateur pour créer de belles générations de marins.